La Commission Européenne a dévoilé sa proposition de directive “sur la diligence raisonnable des entreprises en matière de développement durable” qui vise à imposer aux entreprises un devoir de vigilance pour remédier aux atteintes aux droits humains, aux droits sociaux et à l’environnement dans les chaines de valeur mondiales. L’amélioration de la prise en compte des enjeux environnementaux et sociaux dans la gouvernance et le fonctionnement des entreprises constituait un élément clef du texte.
Si le fait d’instaurer un devoir de vigilance européen contraignant pour les entreprises constitue une avancée non négligeable vers un écosystème économique européen plus durable et plus respectueux des droits humains, nous considérons que la proposition législative n’est pas assez ambitieuse à plusieurs niveaux et nous ne manquerons pas d’interpeler les colégislateurs sur trois points essentiels :
- Sur l’indexation d’une partie de la part variable de la rémunération des directeurs exécutifs des grandes entreprises sur des critères sociaux et environnementaux, nous sommes loin de l’ambition initiale : la proposition législative n’impose pas d’obligation formelle de conditionner une partie des bonus des dirigeants exécutifs à des critères de performance extra-financière, disposition pour laquelle le Mouvement Impact France a plaidé pendant plusieurs mois. Le texte impose aux grandes entreprises [+ de 500 salariés] ayant déjà mis en place un dispositif adossant le calcul de bonus avec la performance environnementale de lier ceux-ci aux nouveaux plans de transition climatique prévus par le texte. Nous pensons qu’il faut aller plus loin : par un mécanisme d’obligation d’indexer une partie de la rémunération variable des dirigeants à des critères de performance extra-financière, puissant levier de transformation ; par la fixation d’un pourcentage minimum de cette part variable indexée sur ces critères, et par la mise en place d’indicateurs communs à toutes les entreprises concernées par cette obligation.
- Nous considérons également que le champ d’application du texte législatif est trop restreint : seules les entreprises de plus de 500 employés devront mettre en œuvre un devoir de vigilance européen exigeant. Les PME, même celles opérants dans des secteurs à haut risque, sont par exemple exclues du processus. Les entreprises de 250 à 500 salariés sont concernées par la mise en œuvre d’une diligence raisonnable “simplifiée” uniquement lorsqu’elles opèrent dans certains secteurs à risques. La proposition risque donc de ne pas couvrir de nombreuses activités commerciales préjudiciables. Nous considérons qu’il faut donc élargir considérablement le champ d’application de la directive afin de faire émerger un modèle économique plus responsable en Europe.
- Enfin, la “diligence raisonnable” doit être effectuée sur l’ensemble de la chaîne de valeur des entreprises, et non se limiter “aux relations commerciales établies”. Le risque ici est celui d’un affaiblissement considérable de la portée de la mesure.
Le Mouvement Impact France appelle donc à renforcer la portée de ce texte lors des prochaines discussions.